Le paternalisme source de la crise française du travail.
Le capitalisme d’héritiers, la crise française du travail de Thomas Philippon, la République des Idées, Seuil, 2007.
Nous poursuivons l’analyse du fonctionnement des systèmes de pouvoir et en premier lieu celui du système capitaliste, libéral et actuellement néo libéral. Les entreprises industrielles et commerciales en constituent le socle. De leur fonctionnement dépend le développement de l’économie et l’essor des relations sociales ou alors le développement des conflits sociaux et le gaspillage des ressources utilisées pour la production et la distribution des richesses.
Depuis 2007, nous utilisons ce livre de Thomas Philippon dans nos cours d’économie et nous présentons sur fileane.com une synthèse de ce livre ainsi que nos commentaires. Nous sommes bien ici face à la crise française du travail et à sa cause principale : le conflit social entre les propriétaires privés des moyens de production et les salariés. Au cœur de ce conflit nous retrouvons les erreurs de la révolution de 1789 que nous venons de voir tout comme le conflit qui porte sur la définition de l’Autorité et de la mission d’autorité et a pour conséquence une conception antinomique entre la Liberté des chefs d’entreprise, celle des dirigeants du système capitaliste et la Liberté des salariés, des citoyens.
Les dirigeants méprisent leur personnel. Il n’y a pas de convivialité.
À la fin du livre, l’auteur cite un passage d’une conversation entre Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand datée du 15 décembre 1995 dans laquelle François Mitterrand regrette de ne pas avoir changé davantage l’entreprise.
Mitterrand indique que les rapports restent beaucoup trop hiérarchiques, distants. Les dirigeants méprisent leur personnel. Il n’y a pas de convivialité.
Cette conclusion illustre la question lancinante qui traverse ce livre : depuis plus d’un siècle, ce mal est connu et pourtant rien n’a changé.
Avant d’esquisser quelques solutions, l’auteur décrit la situation des entreprises familiales et l’impact de ces mauvaises relations sociales par rapport à nos voisins puis il analyse les causes de ce dysfonctionnement. Il présente les avantages et les inconvénients des entreprises familiales puis les conséquences de ce malaise sur le plan économique, social, politique.
Un cercle vicieux qui alimente et entretient la méfiance
L’auteur brosse un portrait objectif des relations sociales en France en insistant sur l’idée que nous sommes pris dans un cercle vicieux qui alimente et entretient la méfiance. Ce qui distingue la France des autres pays, c’est le peu de satisfaction que les salariés tirent de leur travail et la mauvaise opinion qu’employés et employeurs ont les uns des autres. Les difficultés du capitalisme français reflètent ainsi celle de la société en général : on remarque partout la même incapacité à faire émerger des organisations puissantes où les relations sociales se fondent sur une confiance réciproque. L’auteur insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas de la responsabilité d’une minorité de dirigeants paternalistes mais qu’il s’agit au contraire d’un système d’organisation qui a sa logique propre et qui doit se comprendre comme le fruit d’une histoire collective. Dans ce système et dans cette histoire, le capitalisme familial occupe une place centrale.
L’échec du management français à créer des relations sociales productives
Les comportements les plus visibles de la culture paternaliste sont l’absence de délégation, la surcharge de responsabilités au sommet, la déresponsabilisation de la base, les difficultés d’adaptation et de promotion interne.
Ces critiques s’adresse aux entreprises françaises mais elles sont encore plus fortes dans les organisations gérées par l’État. Ces faiblesses ne sont pas nouvelles : elles firent déjà l’objet de vie critique avant la première guerre mondiale alors que l’économie française décrochait par rapport à l’économie allemande.
Le constat de l’échec du management français à créer des relations sociales productives réapparaît après la seconde guerre mondiale lors de la mise en place du plan Marshall. À l’heure de la reconstruction, l’AFAP (association française pour l’accroissement de la productivité) envoi une mission aux États-Unis pour comprendre les causes des écarts de productivité du travail avec la France. Que découvre-t-elle ? Que le retard principal de la France n’est pas technologique, mais il est concentré dans la gestion des ressources humaines.
Les experts américains envoyés en France dans le cadre du plan Marshall concentrent leurs critiques sur les chefs d’entreprise et les patrons français. Rappelant que l’attitude constructive dont font preuve les ouvriers aux États-Unis dépend d’abord de l’attitude constructive de la direction, ils reprochent, notamment, aux dirigeants français de s’opposer à tout changement constructif, de ne pas laisser une responsabilité et une autorité suffisantes à leurs subordonnés. De manière générale, les Français ne sont pas conscients du rapport direct qui existe entre un niveau élevé de productivité et l’application de saines méthodes en matière de rapports humains.
La mauvaise qualité des relations sociales en France est une caractéristique qui ressort de toutes les enquêtes disponibles, et ce de manière durable.
L’auteur utilise un certain nombre d’enquêtes internationales menées par des cabinets de conseil. Il utilise principalement l’enquête de l’IMD, une école de commerce de Lausanne et l’enquête du forum économique mondial, le Global Competitiveness Report ( GCR) . Le rang en 2004 selon l’IME de la France pour la qualité des relations sociales dans l’entreprise, est 57e sur 60 pays ( bonne dernière des pays riches). Et, selon le GCR, elle arrive 99e sur 102 pays. Seul le Venezuela, le Nigeria et Trinidad font pire… La mauvaise qualité des relations sociales en France est une caractéristique qui ressort de toutes les enquêtes disponibles, et ce de manière durable.
Cette perception est partagée par les Français en général et par les salariés en particulier. Parmi les pays d’Europe, la France se classe dernière pour « la liberté de prendre des décisions dans son travail », et avant-dernière (devant la Grèce) pour « la satisfaction dans son travail ». Ce pessimisme n’affecte pas l’ensemble des questions. Les Français sont parfaitement conscients de ce qui va bien en France et ils n’ont pas une vision particulièrement négative de leur vie au général. En revanche, tout comme les dirigeants d’entreprises, les employés français reconnaissent qu’il existe un problème spécifique concernant les relations sociales. Il y a bien là une exception française.
L’opposition fondamentale entre ceux qui dirigent et ceux qui obéissent.
Il y a ici une logique gagnant/perdant et cette attitude se nourrit d’opinions très tranchées sur l’opposition fondamentale entre ceux qui dirigent et ceux qui obéissent. Ces attitudes hostiles au travail s’expriment dans des remarques et des stéréotypes : « un gros bosseur est au mieux « trop bon », au pire un laquais du grand capital, un abruti qu’on peut exploiter ».
Dans le secteur public il en va de même : « dès qu’un professeur devient proviseur, il passe dans le camp ennemi. Au lieu de dire « c’est un des nôtres qui a réussi, on sera mieux compris », ils sont méfiants car il pense qu’il est passé de l’autre côté de la barrière ».
Dans cette conception les managers ne peuvent être heureux qu’en brimant leurs employés et l’émancipation des travailleurs ne peut se faire qu’au détriment des patrons. Au niveau international, certains pays ont la capacité d’organiser le travail de manière à ce que chacun y trouve son compte alors que d’autres pays n’ont pas cette capacité. La France fait partie du petit groupe de pays industrialisés qui n’a pas su développer cette capacité
Les causes historiques du paternalisme:
La loi Le Chapelier du 14 juin 1791
L’auteur indique que la source historique de cette méfiance remonte à la Révolution et à la loi Le Chapelier du 14 juin 1791 qui interdit les corporations, le compagnonnage et les coalitions ouvrières.
Il faudra attendre la loi Waldeck Rousseau du 21 mars 1884 pour légaliser les syndicats professionnels et la loi du 1er juillet 1901 pour que soient abrogés du code pénal les articles portant sur le délit d’association et que soit affirmée la liberté d’association.
En Allemagne et dans les pays du Nord, l’histoire a été différente et ces pays ont trouvé des accords, des compromis entre les patrons et les employés de manière à ce que l’organisation des relations sociales puisse s’établir.
L’histoire du syndicalisme français est particulièrement difficile et se limite à une contestation virulente du pouvoir des patrons.
Dans ce contexte français l’histoire du syndicalisme est particulièrement difficile et se limite à une contestation virulente du pouvoir des patrons. L’État français n’a pas soutenu les salariés et a été hostile au développement des syndicats. Le taux de syndicalisation en France est toujours resté très faible : il était de 1,9% en 1910 et de 8,1% en 2001, soit le plus faible d’Europe. L’Espagne, avant dernière, a un taux de syndicalisation en 2001 de 16,1%. Pour l’auteur, le taux de syndicalisation de 1910 montre que les pays frappés de sous-développement syndical avant la première guerre mondiale semblent bien être ceux qui aujourd’hui ont de mauvaises relations sociales.
Parmi les pays d’Europe, l’Allemagne, la Suisse, la Hollande et l’Autriche ont facilité le développement des organisations professionnelles et ont aujourd’hui des relations coopératives entre employés et employeurs. De même, les pays scandinaves arrivent largement en tête aujourd’hui au niveau du taux de syndicalisation et ils font partie des pays où les relations sociales sont les meilleures et où le niveau de vie est largement supérieur à celui des salariés français.
Les avantages et inconvénients des entreprises familiales et du paternalisme.
L’approche paternaliste qui a consisté à améliorer les conditions de travail, le logement, la santé, a rapidement apaisé les conflits sociaux
Tous les pays industriels ont été frappés par la misère sociale, par les grèves et par les conflits du travail jusqu’à la première guerre mondiale. Si la répression fut la première réponse du patronat, très vite les employeurs se rendirent compte qu’il valait mieux utiliser des relations plus pacifiques et mettre en place un style de direction paternaliste.
Cette approche paternaliste qui a consisté à améliorer les conditions de travail, le logement, la santé, a rapidement apaisé les conflits sociaux.
L’auteur explique que le paternaliste est d’abord né aux États-Unis. Le capitalisme familial a été vite confronté à la croissance des entreprises et les dirigeants familiaux ont dû s’entourer très rapidement de managers professionnels avec lesquels ils ont partagé leur pouvoir. En Allemagne et en France, les grandes familles industrielles construisent également des maisons, des commerces, des écoles et des centres médicaux pour leurs employés. Des systèmes de retraite et d’assurances contre les accidents du travail sont mis en place.
La famille et l’autorité patriarcale sont donc au cœur de l’approche paternaliste.
L’entreprise est présentée comme une famille dont le patron est le père. Elle prend soin de la famille de l’ouvrier dont l’autorité paternelle est mise à profit pour que ses enfants commencent à travailler à l’usine. Il s’agit par-dessus tout d’asseoir l’autorité du patron, d’assurer l’adhésion des travailleurs et de décourager le militantisme. C’est l’aspect positif du paternalisme : éviter les conflits sociaux et maintenir une certaine paix sociale.
La stratégie paternaliste de gestion des conflits du travail semble donc avoir été universelle vers la fin du XIXe siècle. Pourtant elle a évolué ensuite différemment selon les pays. En effet, dès le début du XXe siècle, le management des grandes entreprises allemandes et américaines se professionnalise.
En Angleterre et surtout en France, le management est majoritairement familial et les performances économiques s’en ressentent.
Quand le management est majoritairement familial, les performances économiques s’en ressentent.
L’historien américain Chandler voit un lien direct entre la famille des capitalismes britanniques et français et le management familial qui prive les entreprises des capacités nécessaires à l’exploitation des économies d’échelle caractéristiques des nouvelles industries de l’époque.
Au contraire, « en Allemagne et aux États-Unis, les entrepreneurs firent les investissements en infrastructures et en personnel nécessaire pour exploiter les rendements d’échelle. Les entrepreneurs partagèrent bientôt la direction des entreprises avec les managers qu’ils avaient eux-mêmes recrutés ».
Le déclin de la France
Les faillites du management français ne passent pas inaperçus et alimentent les rancœurs des ouvriers. Les délégués ouvriers aux Expositions assistent, atterrés, au prodigieux développement allemand et américain et ils mettent en cause la mauvaise gestion du capitalisme français. Michelle Lamont remarque que « la fascination du pouvoir a souvent été mis en relation avec la structure de l’entreprise française traditionnelle, avec son autorité centralisée, ses divisions fines entre les couches et les unités qui opèrent, et sa gestion conservatrice et prudente jusqu’au plus bas niveau ».
À la veille de la seconde guerre mondiale le système économique français était également de nouveau en crise et l’on parlait une fois de plus du déclin de la France.
Les similitudes entre le paternalisme et le phénomène bureaucratique
Après 1945 c’est le phénomène bureaucratique, pour reprendre l’expression de Michel Crozier, qui définit le mieux le management des grandes entreprises. Il existe des similitudes entre le paternalisme et le phénomène bureaucratique.
Le phénomène bureaucratique a joué un rôle déterminant dans la continuation des mauvaises relations de travail en France. Le capitalisme familial et le capitalisme bureaucratique sont deux modes d’organisation qui apportent, chacun à sa façon, une réponse au problème fondamental de l’autorité et de la coopération dans les relations de travail.
Dans le modèle familial et paternaliste, l’autorité fonctionnelle s’identifie à l’autorité patriarcale qui lui donne sa légitimité. Dans le modèle bureaucratique, l’autorité est convertie le plus possible en règle impersonnelle et les structures mêmes de l’organisation semblent agencées de telle sorte qu’une distance suffisante puisse établir entre les gens qui ont à prendre des décisions et ceux qui sont affectés par ces décisions.
L’organisation bureaucratique résout les problèmes créés par la défiance des Français envers les relations d’autorité directe, « puisque l’existence de règles impersonnelles et la centralisation permet à la fois de conserver une conception absolutiste de l’autorité et d’éliminer toutes les relations directes de dépendance ».
Les contradictions dont souffrent les Français en matière d’autorité
Selon Michel Crozier, « le système bureaucratique d’organisation constitue la meilleure solution possible des contradictions dont souffrent les Français en matière d’autorité ».
Le capitalisme familial constitue également une solution à ces contradictions, une solution qui est, par certains aspects, plus souple et plus efficace, mais qui peut également devenir un facteur de blocage.
En Allemagne et aux États-Unis, des pays où la confiance entre managers et employés est plutôt bonne, l’organisation de l’entreprise est choisie selon des critères économiques. En France et en Italie, l’organisation de l’entreprise est choisie pour protéger les individus les uns des autres. Cela suppose une définition minutieuse des tâches et des statuts, de manière à ce que chacun puisse se soustraire à l’arbitraire de l’autre.
Le non renouvellement des élites managériales en France
Au niveau des inconvénients du paternalisme, l’organisation bureaucratique française n’est pas propice au renouvellement des élites managériales car le rôle du dirigeant y est sévèrement limité.
La bureaucratie interdit de fait le développement de la promotion interne.
Dans l’organisation bureaucratique, le dirigeant n’embauche pas le personnel, il ne peut pas le renvoyer, il ne peut pas promouvoir ses subordonnés ni même contribuer de façon significative à leur promotion. Ceci interdit le développement de la promotion interne.
Le capitalisme français se caractérise par une forte circulation des élites de l’État vers les entreprises est une faiblesse de la promotion interne managériale. L’absence de renouvellement des élites managériales renforce la logique du « nous » contre « les autres ».
Comme les dirigeants n’ont qu’une expérience limitée de la vie dans les échelons inférieurs de l’entreprise, ils sont relativement méfiants et ont moins tendance à déléguer l’autorité à leurs subordonnés.
La France se trouve en queue de peloton au niveau de la délégation d’autorité
Au niveau de la délégation d’autorité, la France se trouve en queue de peloton, en compagnie du Portugal de la Grèce et de l’Italie.
La cause principale de l’insatisfaction est le manque de liberté de décision
Or quand on analyse des données sur l’épanouissement au travail du point de vue des salariés, on s’aperçoit que la cause principale de l’insatisfaction est le manque de liberté de décision. La situation ne change guère car nous sommes dans un cercle vicieux. Lorsqu’il y a une défiance aussi grande entre supérieurs hiérarchiques et employés, la promotion risque de se faire accuser de favoritisme, péché capital dans ce système.
Loin de remédier à la faiblesse structurelle de la promotion interne, l’État a plutôt aggravé les choses et renforcer un travers existant.
La recrudescence des parachutages étatiques s’accompagne d’une hausse de la part des énarques parmi les grands patrons. En 1993, parmi les grands patrons français, 47% ont fait carrière dans la fonction publique, 21% en entreprise, 24% sont des héritiers, 27% sont des Polytechniciens et 23% des énarques ( 11% en 1985 ).
Le chiffre de patrons ayant fait carrière dans l’entreprise est très faible en France.
Le chiffre de 21% relatif aux patrons ayant fait carrière dans l’entreprise est très faible. En Allemagne, il est de 66% et de 51% au Royaume-Uni.
Les patrons issus de la fonction publique sont en moyenne un peu plus âgés, mais ils ont surtout moins d’ancienneté dans l’entreprise qu’ils dirigent et moins d’expérience professionnelle en général.
Les patrons des filiales étrangères situées en France sont recrutés à 100 % par promotion interne. Les critères de choix des dirigeants ne sont pas les mêmes dans les entreprises françaises et étrangères. Les économistes Francis Kramaz et David Thesmar ont pu montrer que 12 % des entreprises cotées à Paris sont dirigés par d’anciens membres de cabinets ministériels. De plus, comme ces entreprises sont en moyenne très grandes, elles représentent 65 % de la capitalisation boursière.
Les conséquences du paternalisme:
La situation de la France est au cœur d’un cercle vicieux.
Dans ce contexte la situation de la France est au cœur d’un cercle vicieux. Le propre d’un cercle vicieux est qu’il suffit qu’un des éléments se mette en place pour que les autres suivent et abondent dans le même sens.
La radicalisation des syndicats a rendu difficile la coopération et la délégation d’autorité au sein des entreprises, mais la prédilection du management français pour les hiérarchies rigides et des statuts prestigieux a certainement terni l’image des dirigeants et contribuer à l’atonie du capitalisme managérial.
Comme les actions de l’État n’ont fait que renforcer ces travers existants, chacun peut constater que la France possède de quoi boucler plusieurs cercles vicieux.
Faut-il y voir les traces d’une conception particulière de la liberté, qui, selon Philippe d’Iribarne, insiste sur la noblesse, l’honneur et le statut ?
N.d.l.r : cette valeur de liberté ainsi perçue se rattache à la source de pouvoir traditionnelle, elle est en dissonance cognitive avec la valeur de liberté rationnelle voulue par les révolutionnaires de 1790 qui suivirent les idées du siècle des Lumières.
Cette mésentente sur la lecture du mot “liberté ” résume à elle seule la profondeur du fossé qui sépare les dirigeants des salariés.
Cette mésentente sur la lecture du mot “liberté ” résume à elle seule la profondeur du fossé qui sépare les dirigeants des salariés, la minorité au pouvoir du reste des citoyens et depuis plus d’un siècle, les cours obligatoires de philosophie au lycée n’ont eux aussi rien changé : chaque camp reste inflexible dans sa lecture des valeurs de la république et il est certain qu’il se trouve des professeurs pour mettre de bonnes notes aux meilleurs élèves de chacune des lectures de la valeur liberté, par respect du conformisme académique et probablement par respect bureaucratique de la valeur de liberté elle même, sans opérer le moindre choix de société, sans aucun apprentissage de la responsabilité citoyenne.
Le capitalisme familial semble jouer le rôle de valeur refuge face au refus du libéralisme.
Sur le plan économique, le modèle bureaucratique est tombé en désuétude, au moins dans le secteur privé, et l’État se désengage petit à petit de l’organisation de l’économie. Le capitalisme familial, au contraire, se porte bien et semble jouer le rôle de valeur refuge face au refus du libéralisme.
Il existe deux approches distinctes du capitalisme familial.
La première se réfère au contrôle de l’actionnariat, lorsqu’une famille possède une part importante des droits de vote liés aux actions d’une entreprise.
La seconde se réfère au management des entreprises, lorsque l’entreprise est dirigée par un membre de la famille du fondateur.
Il y a une différence importante entre les deux : la situation est plus mauvaise lorsque c’est un héritier qui dirige et moins mauvaise lorsque c’est un professionnel qui dirige à côté de la famille.
l’État providence s’est substitué aux employeurs privés pour développer les avantages sociaux et les assurances sociales.
La stratégie paternaliste a permis aux entreprises familiales d’obtenir un avantage comparatif pour régler les conflits sociaux du XIXe siècle en mettant l’accent sur le bien-être des employés, cette stratégie a fait reculer le syndicalisme et réduit les conflits du travail.
Dans une large mesure, l’État providence s’est substitué aux employeurs privés pour la prise en charge de l’assurance maladie, des caisses de retraite, pour la construction des écoles et des hôpitaux.
Lorsque l’on étudie les liens entre capitalisme familiale et relation sociale au sein des entreprises au niveau des industries et entre les pays, il est possible de montrer qu’il y a effectivement plus d’entreprises familiales dans les pays où les relations sociales sont hostiles.
De même dans les entreprises et les industries où la part de travail est la plus grande, il y a plus d’entreprises familiales.
C’est le cas de la France et il y a beaucoup plus d’entreprises familiales dans les industries où le facteur travail est plus important, dans le secteur de la distribution et elles sont moins présentes dans les industries où le facteur capital est prépondérant, comme les industries lourdes.
Les entreprises familiales offrent à leurs employés une forme d’assurance contre le risque de perte d’emploi.
Sur le plan du marché du travail : à l’échelle d’une entreprise le capitalisme familial n’engendre pas d’hostilité particulière. Les relations sociales en France sont aussi mauvaises dans les administrations et les entreprises publiques que dans les entreprises privées.
En réalité il y a moins de conflits dans les entreprises familiales que dans les autres entreprises. L’économiste David Thesmar montre qu’en France les entreprises familiales offrent à leurs employés une forme d’assurance contre le risque de perte d’emploi. Les entreprises familiales licencient moins que les autres en cas de retournement de conjoncture. En retour les employés acceptent des salaires plus bas, ce qui explique, au moins en partie, les taux de profits plus élevés que l’on observe parfois dans les entreprises familiales.
De manière plus générale, comme la famille est attachée à la survie de l’entreprise, elle a tendance à assurer une gestion prudente, avec un endettement faible et une prise de risque moindre. Pour les travailleurs déjà employés en CDI dans l’entreprise, cela signifie un avenir plus stable qu’ailleurs.
Les entreprises familiales sont bien adaptées à un milieu hostile.
Les entreprises familiales ont donc une approche de l’embauche et des licenciements différentes de celles des autres entreprises. Les entreprises familiales ont nettement plus tendance à décourager la représentation syndicale. De ce fait les entreprises familiales sont bien armées pour évoluer dans un environnement où les relations sociales sont difficiles. Elles sont bien adaptées à un milieu hostile.
Le cas français peut ainsi s’interpréter : les relations sociales en France sont exceptionnellement mauvaises et les entreprises s’adaptent comme elles peuvent. Le capitalisme familial serait le meilleur système possible compte tenu des spécificités françaises.
La gestion des ressources humaines est particulièrement archaïque dans les entreprises où les dirigeants sont des héritiers
Au niveau de la communication et du management : par contre la gestion des ressources humaines est particulièrement archaïque dans les entreprises où les dirigeants sont des héritiers.
Ces déficiences managériales expliquent une part significative des différences de productivité entre les entreprises françaises et américaines.
Les pratiques paternalistes limitent l’émancipation des travailleurs, elles figent les rapports de classes au sein de la société et de ce point de vue, elles restent un facteur déterminant des mauvaises relations sociales à long terme. En particulier le capitalisme familial risque de renforcer un défaut lancinant du capitalisme français : le manque de renouvellement des élites managériales.
Le capitalisme familial héréditaire pose un autre problème : les guerres de succession sont courantes dès que le nombre d’héritiers devient trop grand et choisir un héritier pour diriger son entreprise au détriment d’une autre personne plus qualifiée, c’est affiché sa méfiance vis-à-vis du reste de la société en privilégiant les relations familiales. Ce choix stratégique a un impact sur la performance économique et sur le mode de management.
Les pays où le management est choisi sur des critères purement professionnels sont des pays où l’autorité est déléguée au sein des entreprises, et les pays qui privilégient le management familial sont ceux où l’autorité reste centralisée.
Les pays anglo-saxons et les pays du nord de l’Europe se caractérisent par un management professionnel et une forte responsabilisation des échelons intermédiaires. Les pays méditerranéens conservent un management familial et des relations hiérarchiques centralisées.
Pour travailler en équipe, mieux vaut aller dans les filiales d’entreprises étrangères
Michelle Lamont note que les Américains mettent plus l’accent sur le travail d’équipe que les Français : « dans le monde du travail américain, la convivialité est la clef de l’intégration : aider ses collaborateurs, quels qu’ils soient, à se sentir à leur aise apparaît comme une tâche cruciale. » De plus, « dans la mesure où la prévisibilité des comportements est essentielle à la marche des grandes organisations, les cadres prennent soin d’y éviter au maximum les conflits ».
C’est peut-être cette culture d’entreprise qui explique le succès des entreprises américaines auprès des salariés français. Parmi les entreprises où il fait bon travailler en France, il y a peu d’entreprises françaises : 5 sur 20 alors qu’il y a 12 entreprises américaines dans les 20 premières. Les travailleurs préfèrent travailler dans les entreprises provenant de pays où le management est professionnel et où il y a une plus grande délégation d’autorité.
On peut donc parler d’un avantage comparatif de certains pays en termes de qualité de management. Ces pays font plus facilement émerger des organisations puissantes où le travail de chacun est valorisé. En France, trop souvent, « les cadres savent qu’ils n’atteindront jamais le sommet : la plupart s’endorment, et quelques-uns, les plus entreprenants, s’en vont ».
Nd.l.r : les plus chanceux vont dans les filiales françaises des entreprises étrangères mais ils se condamnent en principe à ne plus pouvoir revenir dans une entreprise familiale, surtout si elle est dirigée par un héritier et les cabinets de recrutement n’oublient pas de le préciser à ces candidats : leurs dossiers font peur aux patrons paternalistes car ils en savent trop sur la manière de mieux diriger une entreprise. Personnellement, nous avons eu droit à cette remarque laconique et définitive chez P.A. Consulting Group, société avec laquelle nous étions en collaboration étroite depuis plusieurs années à travers l’utilisation du test de recrutement P.A.P.I. D’où notre volonté sur fileane.com de quitter les systèmes de pouvoir pour développer nos réseaux citoyens de Vie.
Le conservatisme et la rigidité des hiérarchies sont des freins puissants à la croissance
Au niveau de la croissance : le conservatisme et la rigidité des hiérarchies sont des freins puissants à la croissance surtout quand les entreprises doivent adopter des technologies nouvelles.
La France manque de PME innovantes
Ce point est particulièrement net dans les PME. Il est bien connu que la France manque de PME innovantes : « la France connaît un déficit d’entreprises de taille moyenne, comptant de 50 à 500 salariés, dont il découle un nombre insuffisant des mini groupes français ayant de 500 à 3000 salariés. »
Les patrons de PME se plaignent du fait que les grandes entreprises rechignent à acheter des produits nouveaux. Pourquoi ? Une raison souvent citée et que M. Dupont, en tant qu’acheteur individuel, est prêt à prendre des risques et acheter des produits nouveaux, mais que ce même monsieur Dupont, en tant que cadre dans un grand groupe, cherche avant tout à ne pas prendre de risques. Voilà qui est typique des hiérarchie rigides : elle limite les initiatives et les prises de risques individuels.
Nous retrouvons ici la distinction fondamentale entre les attitudes individuelles et les performances collectives : une entreprise n’est pas la somme des individus qui la composent. Un entreprise mal gérée peut transformer des individus ouverts et entreprenants en petits bureaucrates mesquins et craintifs . Les effets négatifs du manque d’initiatives individuelles ne se limitent donc pas aux grands groupes eux-mêmes, mais rejaillissent sur toute l’économie.
Il existe tout un cortège de conséquences indirectes du paternalisme, dont la première est le chômage.
Sur la plan social : la conséquence immédiate des mauvaises relations sociales dans l’entreprise est bien sûre de rendre les travailleurs insatisfaits. L’histoire ne s’arrête pas là : il existe tout un cortège de conséquences indirectes, dont la première est le chômage.
Le taux de chômage a le plus augmenté dans les pays où les relations sociales sont conflictuelles par rapport aux pays où historiquement elles sont normalement coopératives.
La méfiance entre managers et employés crée un surcoût.
La méfiance entre managers et employés crée un surcoût comme le ferait une taxe ou une prime de licenciement, à la différence près que ce coût est véritablement perdu pour tout le monde.
Ce surcoût déprime la demande de travail des entreprises et diminue l’emploi.
Aujourd’hui la capacité d’adaptation et d’anticipation est devenue la clé du succès des organisations.
La troisième révolution industrielle rend la coopération au sein des entreprise plus cruciale que jamais.
Le mode d’organisation ancien était relativement peu intensif en relations humaines alors que le nouveau l’est beaucoup plus. La troisième révolution industrielle se caractérise par l’importance accrue du capital humain et elle rend la coopération au sein des entreprise plus cruciale que jamais.
Lorsque l’on compare la satisfaction dans l’emploi entre les pays du nord de l’Europe qui ont une tradition de coopération et la France, on peut dire par exemple que les 30 % de français les mieux payés semblent être moins satisfaits de leur travail que les 30 % des Suédois les moins bien payés.
L’écart entre la satisfaction au travail entre les deux groupes de pays s’accroît fortement lorsque l’on descend dans l’échelle des salaires.
Pour résumer, les conséquences pour le marché du travail du manque de coopération au sein des entreprises sont : plus de chômage, moins d’emplois, moins de bien-être pour ceux qui ont un emploi, et des effets néfastes décuplés pour les travailleurs les moins qualifiés.
Une estimation du coût économique global de notre incapacité à créer des organisations où les relations de travail sont productives.
On peut finalement esquisser une estimation du coût économique global de notre incapacité à créer des organisations où les relations de travail sont productives.
Les pays où les relations sociales dans le travail sont constructives sont en moyenne plus riches que les autres. Ce surplus de richesse serait dû en partie à l’augmentation du taux d’emploi et en partie à des gains d’efficacité au niveau des entreprises.
Améliorer la coopération au sein des entreprises peut être chiffré à plusieurs points de PIB
Les solutions présentées par l’auteur :
Les Français n’ont pas confiance dans leur chef d’entreprise, et, pour autant que l’on puisse en juger, la tendance n’est pas à l’amélioration. Selon la SOFRES, en 1985, seuls 25 % des Français exprimaient leur méfiance vis-à-vis des patrons ; ils étaient 55 % en 2005.
Ces relations de méfiance persistent depuis si longtemps que l’on peut raisonnablement douter de la capacité des entreprises à améliorer d’elle-même la situation. Les solutions que dégage l’auteur sont : favoriser la transmission des PME.
Favoriser la transmission des PME
Aujourd’hui la transmission en ligne directe d’une entreprise est nettement plus facile et moins onéreuse. Il faudrait faciliter la transmission pour les cadres et les professionnels.
Financer la croissance des PME
Une seconde solution consiste à financer la croissance des PME.
Le développement d’un gouvernement d’entreprise et par une efficacité réelle des contre-pouvoirs notamment celui de la presse et des médias.
Au niveau de la rénovation du dialogue social, il existe de nombreuses propositions.
L’enjeu est de créer de la confiance et des relations de travail constructifs au sein des entreprises. Cela pose la question de la place des syndicats.
L’État peut favoriser une évolution positive du dialogue social mais il doit d’abord balayer devant sa porte et il doit modifier le statut de la fonction publique. Les réformes qui réussissent semblent partager certains traits, notamment la mise en place d’une structure simple et clair, avec un nombre limité de niveaux possédants le pouvoir de décision.
Cela passe également par le développement d’un gouvernement d’entreprise et par une efficacité réelle des contre-pouvoirs notamment celui de la presse et des médias.
L’éducation et la formation.
Enfin l’auteur termine sur l’éducation et la formation. Il cite Michel Crozier : « le système d’éducation d’une société reflète le système social de cette société et constitue, en même temps, le moyen essentiel grâce auxquels ce système se perpétue ».
Les relations hiérarchiques, la centralisation des décisions et la difficulté à travailler en groupe se retrouve à l’école et à l’université. L’école est bien le modèle auquel nous nous référons dans notre vie adulte.
Apprendre à travailler en groupe et participer à la vie d’une organisation devrait se faire dès le plus jeune âge. Dans la mesure où le travail en groupe est le plus important dans le monde professionnel aujourd’hui, il devrait l’être aussi à l’école, au collège et au lycée.
L’auteur conclut qu’on ne remettra pas durablement les Français au travail sans rendre le travail plus satisfaisant pour tous.
La reconstruction des relations humaines dans l’entreprise est le défi de notre génération, si nous voulons lutter contre les dévastations du chômage et du sous-emploi, de la précarité, du manque de croissance, et si nous voulons être compétitifs dans le jeu du commerce mondial.
Nos commentaires :
Nous avons critiqué à plusieurs reprises sur notre site fileane.com la mentalité des dirigeants qui utilisent des réseaux relationnels pour gouverner dans nos systèmes de pouvoir tout en refusant de considérer que leurs systèmes sont à bout de souffle et qu’ils doivent rediscuter de l’alternative en réseau.
Nous avons également montré la dimension culturelle des insuffisances de nos sociétés pour répondre à nos raisons de vivre. Ce livre vient donc éclairer la question du style de direction paternaliste qui reste très présent en France.
Comme l’auteur le souligne, le problème de fond touche au manque de renouvellement des dirigeants et à la forte présence des héritiers à la tête des entreprises. Cette situation provient dès les années 1900, d’un manque de croissance des entreprises familiales surtout à l’époque où dans les autres pays industrialisés, ces entreprises se développaient.
La description de la situation est parfaitement cohérente. C’est une des premières fois où cette remise en cause du fonctionnement de notre système économique et social utilise les méthodes statistiques et prend un aspect rationnel et logique aussi affirmé.
De ce point de vue, nous sommes très satisfaits de voir ainsi étayer nos points de vue par des études, des analyses imparables du point de vue rationnel et scientifique (même si nos propos nous paraissent tout autant rationnels). Nous avons souvent pris comme exemple le management des entreprises allemandes et nous avions indiqué que la plupart de ces entreprises étaient dirigées par le meilleur des cadres. Ce livre apporte des chiffres qui viennent conforter cette analyse.
Pourtant ce livre suscite de notre part des remarques ou critiques constructives.
Tout d’abord sur le plan des causes historiques : le point de départ indiqué par l’auteur est correct mais incomplet.
Sur notre site, à propos de la révolution de 1789, nous avons montré l’erreur commise : l’obligation de légitimer le pouvoir révolutionnaire par les idées de Rousseau a conduit à la suppression des corps intermédiaires entre l’État et les citoyens.
Les révolutionnaires n’ont surtout pas vu qu’en supprimant la propriété commune, ils préparaient le terrain au développement abusif de la propriété individuelle principalement pour les propriétaires des moyens de productions industriels.
Mais l’origine du malaise est pour nous beaucoup plus ancienne. La différence que l’auteur met en valeur entre les pays du Nord et les pays du sud de l’Europe, réside bel et bien sur le fait que l’histoire de ces pays est différente : en France l’organisation en réseau du temps des cathédrales a été détruite par un monarchie absolue alors qu’en Italie le pouvoir du pape entravait l’essor d’un pouvoir centralisé ; dans les pays du Nord, l’organisation en réseau du temps des cathédrales s’est davantage maintenue à travers les ordres chevaliers teutoniques, l’organisation commerciale de la Hanse.
Cette tradition de coopération a été reprise par le mouvement protestant, les mutuelles souvent dirigées par les pasteurs pour venir en aide aux paysans. Il est alors normal de la retrouver dans le taux de syndicalisation, dans l’habitude de mettre les professionnels à la tête des entreprises, dans le développement de l’apprentissage dirigé par les anciens, le fait que l’entreprise s’engage à recruter ces apprentis et leur permettent pour les meilleurs d’arriver à la direction générale.
Il y a bel et bien là une culture qui a été interdite en France et que les contre-pouvoirs n’ont pas su ou voulu remettre en place.
Cette déchirure depuis plus de 700 ans ne s’est pas refermée, nous en avons conservé des traces à travers les cathédrales, les abbayes détruites restaurées ou survivantes, les chartes des villes libres. Nous avons montré le rôle de Jeanne d’arc entre 1429 et 1431 dans la remise en place d’une organisation en réseau avec des villes libres.
En Alsace l’organisation en réseau a été détruite lorsque les paysans se soulèvent en 1525 pour supprimer les abus du système féodal qui a été restauré après 1307 et la suppression de l’ordre du Temple et la mise à l’écart des ordres chevaliers au profit des troupes royales. Ces paysans et bourgeois des villes qui soutiennent les valeurs du protestantisme ont été écrasées par l’armée du duc de Lorraine pour le compte du roi de France. Les lieux des deux défaites sont connus : le 16 et 17 mai 1525, les troupes du duc de Lorraine tuent environ 20 000 personnes à Lupstein, Saverne et Neuwiller . Le 20 mai, la bataille de Scherwiller fait plus 4 000 morts parmi les paysans.
Ces questions ont constitué ensuite l’enjeu des guerres de religion entre 1562 et 1598 puis au niveau de l’Europe, de la guerre de Trente ans de 1618 à 1648.
La mémoire conservée du pillage des richesses gérées par la propriété commune au temps des cathédrales et la période médiévale florissante.
Pendant 7 siècles, les populations ont conservé le souvenir du vol et du pillage des richesses gérées en commun par les ordres monastiques et chevaliers et elles n’ont pas cessé de réclamer la remise en place d’une forme de propriété commune au profit de leurs groupes sociaux.
Nous avons montré également comment la noblesse a récupéré ces richesses, ce qui aboutit en 1790 à la vente des biens du clergé sous la forme des biens nationaux. L’empire de Napoléon n’a pas réglé cette question.
Un nouveau signal fort pour montrer que la domination des aristocrates n’entendait pas coopérer avec le monde ouvrier, a été les massacres successifs des canuts de Lyon dans les années 1830. Nous avons montré à quoi correspondait le slogan ouvrier du XIXe siècle : « le tarif ou la mort ». Pour nous, les origines de cette déchirure sont claires et nettes : elle porte la responsabilité des rois de France associés à la papauté et au catholicisme le plus intégriste.
Pour résumer ces racines anciennes, l’auteur reprend la célèbre analyse de Tocqueville : « la division des classes fut le crime de l’ancienne royauté, et devint plus tard son excuse ; car, quand tous ceux qui composent la partie riche et éclairée de la nation ne peuvent plus s’entendre et s’entraider dans le gouvernement, l’administration du pays par lui-même est comme impossible, et il faut qu’un maître intervienne ».
Sous l’Ancien Régime, ce maître était bien entendu le roi de droit divin. Ce principe d’administration qui consiste à faire régner le désordre pour pouvoir mieux imposer ensuite son pouvoir reste évidemment d’actualité et se retrouve dans le paternalisme : mieux vaut un patron qui dirige que des conflits permanents et l’absence de travail.
L’auteur a raison de montrer que le syndicalisme dans ce contexte a eu une enfance difficile et n’a pas pu se développer. Ceci explique son caractère radical et farouchement opposé au patron et à la classe dirigeante issue de la bourgeoisie qui a pris le pouvoir en 1789 sans coopérer avec le reste de la population hormis pour trouver des soldats et mener batailles pour défendre ses intérêts particuliers.
L’auteur aurait pu cependant mentionner les nombreux ouvrages qui portent sur le rôle des protestants dans les débuts de l’industrialisation de la France et comme nous le faisons, prendre l’exemple de la société industrielle de Mulhouse qui est à l’origine de plusieurs sociétés internationales françaises qui n’ont pas été imprégnées de paternalisme outrecuidant.
Cette histoire reste actuelle et présente des similitudes importantes : jadis les populations se sont révoltées contre le retour du système féodal et le retour de l’arbitraire des nobles et du roi après avoir connu trois siècles florissants sous des organisations en réseau, lorsque le roi de France était ruiné.
Aujourd’hui les salariés qui ont connu les Trente Glorieuses se désespèrent et sont en colère en constatant l’arrêt de l’ascenseur social, les politiques qui écrasent les classes moyennes d’impôts et de taxes en tous genres, le triomphe des fils à papa et le développement des corporatismes et des réseaux occultes d’influence qui instaurent de nouveaux privilèges et interdisent la promotion sociale des autres, notamment de leurs enfants, champions d’Europe du chômage des jeunes.
Ils refusent d’admettre que les entreprises familiales paternalistes soient leur seul recours face aux dégâts du libéralisme et de la mondialisation. Accepter ce constat consiste à effacer les acquis sociaux du 20ème siècle, à renier les luttes de nos parents, ce qui est contraire à toutes les valeurs familiales.
Renier sa famille pour favoriser la richesse de celles des patrons et la ruine du pays, ce n’est plus du Corneille mélangé à du Racine, encore moins du Molière, ce sont des drames ordinaires, des suicides au travail qui consument une société jusqu’à ce que la chaleur devienne flamme et le feu un brasier que l’on éteint dans le sang… comme dans le temps.
Il est pourtant possible aujourd’hui, à la lumière du passé du préparer un avenir avec des transitions paisibles mais rapides et efficientes : réussir la révolution de velours que les français n’ont jamais su vivre, retrouver de nouvelles organisations en réseau.
L’auteur sous estime le coût négatif du paternalisme en France et des relations sociales conflictuelles.
La deuxième critique que nous formulons porte sur l’évaluation globale du coût négatif du paternalisme en France et des relations sociales conflictuelles depuis un siècle.
Sur notre site nous avons utilisé l’enquête menée en Allemagne en 1996 et qui avait été reproduite dans plusieurs revues françaises. Nous avions dit qu’au vu de cette enquête, le coût de la démotivation au travail en France était au moins de l’ordre de 400 Milliards de Francs par an, somme qui manque évidemment au PIB.
L’auteur a raison d’ajouter à ce surcoût de la démotivation, une partie du coût du chômage, le coût des mauvaises relations sociales et des conflits du travail ainsi que le coût des erreurs stratégiques menées par des dirigeants incompétents.
Nous avons montré dans la Partie 1 les Institutions des Réseaux de Vie, le fonctionnement des équipes de projets de vie puis la démarche qualité totale qui permet de calculer aussi le Coût d’Obtention de la Solidarité à travers l’utilisation du principe politique de la subsidiarité. Ces évaluations des budgets pour obtenir la qualité totale et la solidarité sont rassemblées dans le Plan qui à son tour, sert de base pour l’utilisation de la Monnaie Pleine, sans dettes. Nous allons bien plus loin que les propos de Thomas Philippon.
Et nous reprenons nous aussi les erreurs cuisantes du management français, spécialement celui des entreprises dans lesquelles nous avons travaillé quelques années.
Par exemple le coût estimé de l’erreur commise par le Président de Thomson multimédia qui refuse d’investir dans la technologie des écrans plats alors que les brevets lui sont apportés par RCA achetée en 1988 et ont été utilisés de suite pour les salles de commande des SNLE ( sous-marins nucléaires lanceurs de missiles ) et que les ingénieurs du Commissariat à l’énergie atomique demandent l’utilisation de ces brevets pour équiper les centrales et les centres de recherche nucléaire d’écrans plats.
Ce refus d’investir du Président de Thomson fera le bonheur de Samsung et des Coréens et de l’entreprise chinoise qui a pris depuis le contrôle de Thomson Multimédia.
L’auteur parle de plusieurs points du PIB, il n’ose pas dire ce que pourtant les salariés français ont compris depuis longtemps :
le mauvais management et les lacunes de la gestion des ressources humaines dans notre pays ont ruiné nos caisses sociales à cause de niveau de chômage excessif sur plus de 30 ans,
à cause d’une automatisation de nos moyens de production qui n’a pas été efficiente car la formation professionnelle est restée insuffisante
et pour d’autres raisons évoquées dans ce livre, notamment le désir furieux des salariés de plus de 50 ans de quitter cet univers du travail dans lequel, avec l’âge, ils sont forcés de constater qu’ils ont été dupés, maltraités par cette culture du mépris et de l’auto suffisance affichée depuis des siècles par les élites dirigeantes, tout simplement parce qu’ils n’étaient pas nés du bon côté de la fracture sociale.
Dès lors les mesures prises sur la protection sociale et les retraites sont perçues comme particulièrement injustes et non fondées même si des réformes sont nécessaires pour accompagner les évolutions sociales et démographiques.
A la place des héritiers, des énarques, des politiciens et des dirigeants issus de la fonction publique, le pays a besoin de compétences en gestion des ressources humaines et en management participatif pour relever enfin ce défi qu’il a refusé avant 1914, avant 1940 et après 1945 et qu’il refuse toujours actuellement.
Pour estimer ce coût global provoqué par nos mauvaises relations sociales, nous pouvons dresser le tableau suivant en milliards d’euro par an :
coût global provoqué par nos mauvaises relations sociales
PIB 2006 en milliards d’euros par an | 1 792,00 |
Pour mémoire : 2% du PIB = | 35,84 |
3% du PIB = | 53,76 |
Évaluation du coût de la peur dans les entreprises françaises sur la base de l’enquête de 1996 en Allemagne ( 400 milliards de francs/an ): démission interne, absentéisme, turn over, alcool, médicaments, harcèlement moral… | 61 |
Coût complémentaire des mauvaises relations sociales sur l’économie, le chômage, le manque de croissance, la perte d’investissements et de marchés : 2% du PIB ( estimation minimaliste ). | 36 |
sous-total : | 97 |
Évaluation de l’évasion fiscale vers les paradis fiscaux | 50 |
soit un manque total de 147 à 150 milliards d’euros par an, ce qui représente le coût de non qualité de notre système de pouvoir français. | 150 |
Comparaison avec les déficits sociaux et les budgets pour l’environnement et la recherche | |
Déficit assurance maladie, prévision 2007 | 12 |
Déficit retraite régime général, prévision 2007 | 5 |
Pour le régime des retraite de la fonction publique, il n’y a pas de caisse de retraite car les pensions sont payées par les lois de finances annuelles et la Caisse de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) est actuellement excédentaire (2,7 milliards d’euro en l’an 2000). Elle finance ainsi une partie du déficit d’autres régimes moins favorisés comme ceux de la SNCF, des mineurs ou des artisans. | |
Dépenses actuelles pour l’environnement : 2% du PIB | 35,84 |
Dépenses pour la recherche : budget fixé à 2,5% du PIB soit plus qu’actuellement | 44,80 |
total : | 97,64 |
reste disponible pour les investissements de croissance par rapport au total de 150 milliards d’euros de coût de non qualité de notre système de pouvoir | 50 |
les aides de l’état pour les entreprises, exonérations de charges, etc. en 2010 un certain nombre de ces aides correspondant à des niches fiscales peuvent être supprimées, ce qui aide d’autant les finances publiques si les investissements ne sont pas là. | 65 |
Ces chiffres nous donnent un ordre de grandeur, ce sont des estimations minimales.
En prenant en compte la dégradation de la confiance entre 1985 et 2005 ( augmentation de 25 à 55% de la méfiance des salariés envers leurs patrons, enquête SOFRES ), les chiffres de l’enquête allemande de 1996 peuvent être transposés en France avec une hausse plus forte que celle que nous avons estimée .
Les vagues de suicides au travail depuis les années 2005 corroborent une estimation plus importante.
Il saute aux yeux que le gisement de productivité lié à l’abandon du style de direction paternaliste et au développement d’un style de direction participatif est énorme et suffit à lui seul à combler nos déficits sociaux.
Si nous ajoutons les 50 milliards d’euros par an d’évasion fiscale vers les paradis fiscaux, le constat devient accablant pour nos dirigeants et révoltant pour les citoyens.
Nous devons par l’action politique refuser les décisions actuelles de toujours faire payer aux salariés et aux citoyens ces déficits de notre protection sociale. Le patronat doit être mis hors d’état de nuire sur ces questions avec sa volonté séculaire de privilégier ses seuls intérêts depuis 1789. Sa contestation des mesures prises après 1945 pour développer la Sécurité Sociale, son refus récurrent d’en faire une Institution de Solidarité nationale, ses manœuvres pour ne pas financer la protection sociale au motif que le dogme de l’économie libérale et les politiques des pays anglo-saxons refusent ce financement public de la Protection sociale, sont des actes anti-républicains et une trahison envers les citoyens français.
La résistance à l’oppression est prévue dans l’article 2 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. Sauf que nous connaissons la jurisprudence nouvelle sur cette question : dès qu’une mesure gouvernementale est prise pour défendre l’intérêt d’autrui, la santé publique, la sécurité publique, voire le Bien commun (tout en interdisant la gestion des Biens Communs avec la propriété commune), il peut limiter même fortement les Libertés publiques. Pour la réforme des retraites, nous en sommes là : aucune remise en cause de l’attitude détestable et sectaire du patronat et des dirigeants du système capitaliste libéral, néo libéral français mais application stricte des dogmes néo libéraux pour avancer vers la privatisation de la Protection sociale et faire payer toujours plus les salariés en les obligeant à travailler jusqu’à 65 voire 70 ans.
Or ce sont eux les premiers responsables de la crise du travail en France et des politiques pour détruire les mesures du Conseil National de la Résistance de 1945, certes à laquelle Résistance ils n’ont pas voulu adhérer puisqu’ils avaient choisi l’autre camp, celui de la guerre contre le communisme soviétique menée par les nazis avec l’appui des dirigeants de l’oligarchie anglo-saxonne et sa secte des puritains.
Pourtant dans les années 1980, le mouvement qualité totale a réussi à résorber les 2/3 de la non qualité dans la production ( environ 200 milliards de francs/an ). Cette démarche s’est appuyé sur le réseau des cercles de qualité qui a pratiqué les méthodes de résolutions de problèmes selon le principe de subsidiarité. Le point de départ de cette démarche fut le constat humble mais sérieux que selon la règle des 80/20, 80% des problèmes venaient de la direction et du management, principalement des styles de direction autocratique et paternaliste, ce qui a eu pour conséquence la mise en place de lignes hiérarchiques plus plates et moins nombreuses et le développement du style de direction participatif.
La suite est connue : fermeture par les actionnaires, de ce management direct local participatif dans les entreprises et délocalisation des entreprises françaises pour profiter du dumping salarial et fiscal… et ne plus financer du tout alors la Sécu !
C’est d’autant plus vrai si nous ajoutons les économies réalisées par un retour au plein emploi, par le maintient au travail des seniors jusqu’à l’âge de la retraite et l’emploi des jeunes entre 20 et 30 ans.
Si nous ajoutons une taxation des robots, nous comprenons que nos régimes sociaux vont devenir immédiatement excédentaires, ce qui permet de constituer des provisions pour amortir le choc démographique. Tout ceci en restant dans le cadre de notre système de pouvoir et de nos institutions sociales.
Cette démarche pour développer la qualité de nos relations sociales et de la gestion de nos ressources humaines a pour point de départ l’abandon et l’élimination des tabous séculaires et une révolution culturelle majeure dans le fonctionnement des entreprises comme dans celui de l’État. En éliminant ces dysfonctionnement et en changeant les attitudes et le style de management, nous pouvons même financer les dépenses actuelles de recherche et de protection de l’environnement. . . Nous avons montré que la paix social dans les Réseaux de Vie se développe sans la présence et l’intervention de la structure de l’état. Le chemin est tracé pour quitter les systèmes de pouvoir.
Nous ne manquons pas de richesses mais nous gaspillons beaucoup plus que les autres pays nos capacités à nous développer à cause d’un management obsolète et injuste.
Depuis 2003, nous insistons sur le fait que nous ne manquons pas de richesses mais que nous gaspillons beaucoup plus que les autres pays nos capacités à nous développer à cause d’un management obsolète et injuste qui trouve son prolongement dans le niveau élevé de l’évasion fiscale… et le scandale de notre république que n’arrivent à étouffer l’utilisation abondante d’utopies et de mythes de toutes sortes pour faire croire à l’opinion publique que cette république et ce système de pouvoir néo libéral ont encore une légitimité.
La conséquence directe de cette situation implique une toute autre politique sociale que celle menée par les derniers gouvernements.
- Vouloir privatiser la sécurité sociale est une chose, il suffit de le dire ouvertement pour prendre la responsabilité de cette ouverture des hostilités
- mais élaborer des lois pour contraindre les salariés à payer pour les erreurs et les intérêts égoïstes des familles dirigeantes et des élites républicaines,
- demander aux salariés de travailler plus,
- aux automobilistes de payer plusieurs centaines de millions d’amendes pour des infractions minimes le plus souvent aux règles de vitesse,
- tout cela pour combler les déficits publics dont la principale cause réside dans l’évasion fiscale des sociétés les plus puissantes et les citoyens les plus riches, représente pour l’état une complicité flagrante de nature à légitimer une nouvelle révolution.
- Laisser faire cette situation en camouflant la réalité sous des mesures de bouclier fiscal qui ne correspondent pas à la réalité de l’évasion fiscale des entreprises situées en France est un acte de complicité grave. Il ne faut pas confondre le salarié qui travaille avec les entreprises et les dirigeants qui accaparent des revenus sans aucune mesure avec le travail salarié et sans aucune justification éthique ou morale.
Nous conseillons aux militants de la suppression des acquis de la Résistance et de la Sécurité Sociale, plutôt que de privatiser et donner aux institutions financières une rente scandaleuse, d’utiliser au minimum, l’exemple des fonds de pension américains.
L’exemple des mutuelles et des coopératives ou des fonds de pension.
Certes ils utilisent la bourse pour accroître leurs portefeuilles de titres, mais au départ ce sont des mutuelles : le président est élu par les membres et les mutuelles de fonctionnaires américains pour le moment rachètent les actions de nos entreprises françaises au point que les salariés des entreprises du CAC 40 travaillent aussi pour payer les retraites des fonctionnaires américains avant de payer avec leur impôts, la retraite des fonctionnaires français puis la leur.
Il est clair que cela nuit à la progression du pouvoir d’achat des salariés français. Lorsque l’on prend l’exemple bien connu en France de Calpers, le fonds de pension des fonctionnaires de Californie, nous constatons aujourd’hui que cet esprit mutualiste défend des valeurs éthiques et il a obligé le laboratoire GlaxoSmithKline à baisser le prix de son traitement anti-sida en Afrique ; Général Électrique a dû changer les règles d’attribution des stocks options ; Calpers a demandé à Tycho de quitter le paradis fiscal des Bermudes ; Rank Xerox a été placé en tête des entreprises les moins éthiques par Calpers en 2003 ( source : L’Express, 15 mai 2003 ). Nous n’allons pas poursuivre ici ce conflit nouveau entre les fonds de pension aux valeurs mutualistes et éthiques, et les fonds d’investissements beaucoup plus agressifs et spéculatifs.
Choisir son camp n’est pas difficile pour qui veut le bien de tous.
Le développement des organisations en réseaux que nous préparons sur notre site fileane.com intègre ce changement radical dans l’attitude de nos dirigeants.
Les solutions présentées par l’auteur nous conviennent dans un premier temps car elles sont orientées vers davantage de participation directe dans les organisations. Encore faut-il qu’elles soient immédiatement reprises par les acteurs politiques et sociaux.
Sur notre site, régulièrement nous écrivons que nous ne comprenons pas la passivité, le mutisme des partis de gauche comme des syndicats sur la question du droit de vote des représentants des salariés au conseil d’administration ou au conseil de surveillance si ce n’est au comité d’entreprise. Ce silence coupable renforce la méfiance des salariés envers leurs représentants. Si nos dirigeants, y compris syndicaux, ne veulent pas poser cette exigence et participer au changement de management dans les entreprises et les administrations, qu’ils le disent ouvertement et démissionnent.
Il y a tellement de salariés, comme l’écrit l’auteur, qui ont compris qu’ils n’arriveraient jamais à la Direction de leur entreprise malgré leurs compétences, que c’est à eux que revient le droit de poser cette revendication sur la table des négociations.
Sur ce site, nous ne sommes pas leur porte parole, certes, mais plusieurs membres de notre équipe, parmi les plus entreprenants, ont refusé d’entrer dans des entreprises familiales et ont quitté cet univers typiquement français du management paternaliste scandaleusement désuet et ruineux.
Souhaitons, par exemple, que les concessions qui vont gérer à partir de 2009 la production des voitures à moteur fonctionnant à l’air comprimé, ne soient pas dirigées d’une manière paternaliste.
De même, souhaitons que l’administration bureaucratique accepte de prendre le risque de verser la prime de bonus pour ces voitures qui ne dégage pas de CO2 en roulant à l’air comprimé. Annoncée au prix de base de 3 500 euro, cette prime d’un maximum de 5 000 euro va permettre d’acheter ces voitures à coût nul pour les consommateurs. Cette perspective de régler rapidement la pollution des villes due aux transports, donne un élan d’optimisme et rend moins insupportable la spéculation sur la hausse du prix du baril du pétrole.
Restons attentif cependant pour que ce progrès majeur ne soit pas détourné et stopper par les groupes de pressions pétroliers et financiers. Pour financer le développer rapide des concessions de production, pas besoin de faire appel aux banques commerciales, à 3 500 euros la voiture, une tontine suffit dans le cadre d’une mutuelle ou d’une coopérative de production. Si en plus ces concessions peuvent être libres, libérées de l’impôt, nous ne rêvons pas, nous mettons seulement deux pieds dans l’actualisation du temps des cathédrales et dans le développement de nouvelles organisations en réseaux.
Nous vivons le temps des possibles, raison de plus pour se débarrasser des tabous et des carcans du passé le plus sordide.
L’abandon du paternalisme dans nos organisations de travail doit être une priorité nationale immédiate et impérative.
Nous demandons que l’abandon du paternalisme dans nos organisations de travail soit mis au rang de priorité nationale immédiate et impérative avant toute remise en cause des acquis sociaux et toutes négociations sociales.
Ce livre démontre une fois de plus cette impérieuse nécessité de changer de management dans notre pays, il est inutile d’attendre le suivant !
L’auteur n’a pas cherché à établir un lien de causalité entre le paternalisme et cette détestable habitude des managers français de ne vouloir employer que des salariés entre 30 et 40 ans. Ce lien se trouve dans le conformisme, l’absence de prise de risque dont parle pourtant l’auteur. Il faut aussi ajouter un fait incontestable : les salariés seniors avec leurs compétences ne sont plus aussi enclins que des débutants, à se soumettre devant la contestable autorité d’un dirigeant paternaliste : ils font peur aux patrons avant de faire peur aux économistes pour le coût éhonté qu’ils représentent pour la collectivité du fait de leur inactivité forcée.
De notre côté, nous allons poursuivre la publication de nos textes sur la réforme de l’enseignement et de la formation pour montrer comment des organisations en réseau assurent ces étapes du développement des ressources humaines et des compétences.
Ce qu’écrit l’auteur va se retrouver dans nos développements mais nous iront bien plus loin. Un simple rappel pour nos citoyens passifs et endormis, soumis dans le conformisme à la mode : Allemagne et dans les pays scandinaves, l’âge de la retraite peut être supérieur à celui de la France, cela pose moins de problèmes car à partir de 50 ans les salariés qui sont devenus des experts dans leur domaine et qui sont payés en conséquence, deviennent le plus souvent des formateurs dans les centres d’apprentissage et les instituts d’enseignements supérieurs pour transmettre leurs compétences à la génération suivante sinon ils accèdent à la direction générale de leurs organisations.
Ils ne restent pas derrière leurs machines dans les ateliers ou derrière leurs bureaux à subir le paternalisme ambiant et déprimant, sans possibilité de promotion interne, en constatant durant leurs vacances que leurs voisins de Hollande jusqu’en Suède et Finlande ( sans compter les nouveaux riches russes, mais c’est un cas spécial !) ont un bien meilleur niveau de vie qu’eux ( mais pas forcément de culture et de politesse ). Ces rencontres remplacent les visites aux Expositions faites avant 1914 ou 1940 dont parle l’auteur.
Dans ces pays, les cadres et techniciens, pour transmettre leur savoir aux étudiants, n’ont pas besoin de passer les concours de professeurs d’université ou d’accepter la précarité et le mépris du statut de vacataire. Leurs salaires restent le plus souvent à la charge de leurs entreprises qui financent ces instituts de recherche et de formation. Le constat est toujours le même et toujours aussi accablant pour la France.
Dernière critique mais pas pour l’auteur car nous connaissons un peu les habitudes des maisons d’édition et leur prudence non seulement paternaliste mais aussi servile envers la pensée unique des élites franco françaises ( qui sont forcément la première cible commerciale de ces éditeurs mais qui viennent aussi lire nos pages web…) : l’éditeur aurait pu tout de même demander à l’auteur d’indiquer quand, dans quel délai, il voit la fin du paternalisme en France après plus d’un siècle d’incitation aux mauvaises relations sociales et au moins sept siècles d’enrichissement sans cause sérieuse et citoyenne.
L’implication des français dans le monde associatif
La domination du paternalisme dans notre culture avec ses sempiternelles mauvaises relations sociales provoque aussi une revanche : privés par la loi scélérate Le Chapelier de 1790 jusqu’en 1901 de la liberté d’association (soit pendant 111 ans) , les français sont depuis des décennies très impliqués dans le monde associatif.
Pour un majorité de citoyens privés de promotion interne dans la vie professionnelle, la réussite ne passe pas uniquement par l’argent, le pouvoir et la position sociale ( voir le sondage Capital-CSA d’août 2007 ). Beaucoup considèrent qu’on peut s’épanouir davantage en servant une cause, petite ou grande, utile à la société.
En France, les associations et organismes à but non lucratif sont particulièrement nombreux et dynamiques : plus d’un million. La moitié des français a un jour fait partie d’une association et chaque année, il y a près d’un tiers des français qui sont impliqués dans ces organisations comme donateur, bénévole ou salarié. Ce qui est un record mondial.
Beaucoup se contentent de créer du lien social dans les villages et les quartiers mais certaines conduisent des actions humanitaires de premier plan au niveau mondial ( Médecins sans frontières ).
Le problème provient du fait que les pouvoirs publics ont interdit le développement des SEL ( services d’échanges locaux ), ce qui limite la dimension économique et sociale de ces organisations qui doivent rester obligatoirement dans le cadre du bénévolat sans pouvoir créer des emplois et des richesses dans l’économie non marchande afin de protéger les intérêts des dirigeants de l’économie marchande et la croissance des inégalités dans l’économie marchande.
La fin des PME-PMI familiale par le rachat des fonds d’investissements anglo-saxon.
Une autre réponse possible sur la date de la fin du paternalisme est liée au développement du rachat des entreprises paternalistes françaises par les fonds de pension et surtout ces dernières années par les fonds d’investissements anglo-saxons. Ces fonds collectent l’argent des banques, des assurances, des fonds de pension ou des milliardaires pour racheter des entreprises et faire fructifier cet argent à travers l’achat à crédit d’entreprises.
La restructuration de ces entreprises se limitent souvent à la suppression de dépenses jugées inutiles et à la réduction de la masse salariale et parfois à des investissements technologiques que les anciens propriétaires familiaux n’avaient pas réalisés.
La fameuse technique du L.B.O. ( leverage but out ) est une martingale licite sur le plan financier qui vire souvent au cauchemar sur le plan social et en France, la liste est longue des entreprises rachetées par ces fonds d’investissement qui ont perdu la majorité ou la totalité de leur production et de leurs emplois qui ont été délocalisés dans des pays voisins pour réaliser des économies d’échelle ou dans des pays à faible coût de main d’œuvre pour augmenter les marges de profit.
Lorsque les investissements ont lieu en France, ils peuvent faire augmenter les bénéfices de plus de 30% mais les bénéfices de l’opération sont réservés aux propriétaires des fonds d’investissements. Les salariés n’en profitent pas. Seuls les managers salariés reçoivent des millions d’euros pour prix de leur collaboration et de leur obéissance sans faille.
Sur ce point, nous sommes toujours en présence du paternalisme et les fonds d’investissements perpétuent le paternalisme au moins vis à vis des managers. Ces managers peuvent reproduire ce paternalisme vis à vis des salariés ou bien, comme la plupart du temps, utiliser des méthodes plus autocrates au point de déclencher de nouveaux conflits sociaux. Les actionnaires confisquent la totalité des bénéfices et les salariés doivent se soumettre à des politiques très restrictives sur le plan budgétaire et très démoralisantes sur le plan social.
L’auteur explique bien au début du livre que les français veulent travailler et ne sont pas fâchés avec la valeur du travail. Ils veulent seulement avoir droit au partage équitable des fruits de leur travail. Nous leur répondons que dans les organisations en réseau, ce partage équitable fonctionne et donne naissance à des civilisations florissantes qui vivent des relations sociales fondées sur un haut niveau de confiance, et d’amour et de paix.
A côté de la capitalisation des droits sur les sociétés réservés aux actionnaires, nous savons comment fonctionne la capitalisation des droits sociaux réservés aux salariés. Depuis 1850, le paternalisme a combattu farouchement la mise en place d’une telle mesure qui nie radicalement tout droit à hériter d’une entreprise pour la diriger. Nous nous battrons pour que de telles mesures se mettent en place et sans attendre forcément un nouveau choix de civilisation.
De même depuis la crise financière de 2008 toujours en cours en 2022, nous avons appris à utiliser une Monnaie Pleine, sans dettes.
Ces mesures politiques économiques et sociales nous mènent droit vers cette nouvelle civilisation humaniste, loin des dérives tyranniques de l’oligarchie financière anglo-saxonne et de sa pensée ultra libérale.
le lien entre le paternalisme et la bureaucratie et le scandale des pertes financières de la Société Générale :
mise à jour du 31 janvier 2008 :
Hier soir au journal de 20 heures sur France 2, nous avons vu le PDG de la Société Générale avouer froidement qu’il ne connaissait pas le trader, son employé, qu’il ne l’avait jamais vu.
Nous savons aussi depuis quelques jours que ce trader n’avait pas pris de vacances depuis au moins deux ans et qu’il a 31 ans semble-t-il.
La Société Générale est une société anonyme traditionnelle avec un conseil d’administration. Ce n’est pas une SA moderne avec un directoire et un conseil de surveillance. Le poids des salariés experts dans l’exécutif est forcément plus faible car un seul homme dirige l’exécutif et non pas un groupe de quatre à cinq directeurs. Nous sommes statutairement dans la vieille tradition française du management. Celle dont parle Thomas Philippon dans son livre que nous venons de présenter.
Venons-en à la gestion des ressources humaines visiblement typiquement vieille France elle aussi. Comment se fait-il qu’un PDG situé dans une tour de la Défense en 7 ans ne prenne pas l’ascenseur pour aller saluer au moins une fois par an l’équipe de salariés qui lui rapporte le plus de bénéfices ou est capable de lui faire perdre des milliards (5 milliards pour le moment) ?
C’est choquant et révoltant : la bureaucratie et le paternalisme partage un point commun qui s’explique par l’origine commune de cette attitude de management : le mépris ou l’ignorance des salariés qui composent une entreprise.
Cette absence de marque de respect est totalement impensable dans les entreprises étrangères, à commencer par les entreprises américaines et allemandes.
Prenons l’exemple de cette usine chimique américaine le long du Rhin,
une taille moyenne par rapport aux usines de Schweizerhalle à Bâle ou de Ludwigshafen en face de Mannheim.
Vincente, notre chairman of the board, venait au moins tous les 3 ans des States serrer les mains du personnel et des ouvriers. Il n’avait rien à dire de spécial, il se dérangeait pour venir discuter, manger, boire, rire et passer une journée avec nous. S’il y avait de mauvaises nouvelles, nous les connaissions déjà et il venait pas pour tenir des discours démagogiques ou paternalistes sur le sens de l’effort et du devoir envers la firme.
En principe nous organisions une petite fête avec nos partenaires locaux : exemple : célébrer le nouveau camion de pompier flambant neuf que la société offrait en cadeau à la caserne de pompiers la plus proche. Ce n’était pas un don philanthropique ni gratuit : tous savaient que ce camion venait renforcer la capacité d’intervention des pompiers locaux en cas d’incendie important à l’usine et que ce camion était destiné aussi à rendre un peu moins jaloux les pompiers locaux car l’usine avait des camions de ce type et il était difficile d’imaginer que les centres de secours environnants puissent acheter un tel équipement sur les fonds publics surtout dans un village aussi petit.
L’usine de la métallurgie appartenant à un groupe allemand
Ce n’est qu’un exemple. Prenons un autre exemple, dans cette usine de la métallurgie appartenant à un groupe allemand bien connu, le PDG venait chaque année à l’usine et il discutait avec tout le monde, il recevait les délégués syndicaux à part pendant une heure et tout était mis sur la table, hors de la présence de la Direction de l’usine. A la fin de la journée, nous nous retrouvions Direction et membres du comité d’entreprise autour d’une table dans notre cantine pour un casse-croûte avec saucissons, fromage, vin ou bière et nous discutions de l’avenir de l’entreprise et de l’usine en imaginant tous les cas possibles, les meilleurs et les pires avec forces rires et boutades et il avait souvent des idées que nous n’attendions pas de lui.
Une année, il avait constaté que cette cantine faisait pitié à voir. Autour de la table, il nous avait dit que l’année prochaine il voulait être reçu dans un véritable restaurant d’entreprise. Nous avons aussitôt engagé l’Alsacienne de Restauration et Marc, son dynamique PDG nous a réalisé ce véritable restaurant d’entreprise. C’était simple direct et nos poignées de mains étaient chaleureuses, y compris bien entendu celles des délégués syndicaux. Ajoutons sans forcer sa modestie, qu’il appartenait à un famille protestante chassée de France par Louis XIV et qui avait monté des affaires industrielles et commerciales en Sarre allemande. De ce fait, il parlait un français sans accent germanique avec une modestie toute protestante et une écoute des gens autour de lui à l’inverse total du mépris des dirigeants paternalistes français dont il est question dans ce livre de Thomas Philippon.
Autre exemple de rapports sociaux dans les entreprises où j’ai travaillé.
Au niveau de la gestion des congés payés,
dans cette usine chimique, chaque année en comité d’entreprise nous épluchions le soldes des congés non pris de l’année précédente : le but était simple.
C’est une mesure de sécurité : dans une raffinerie ou une usine chimique classée Seveso, tous doivent être en forme, attentifs car la moindre bêtise humaine peut se transformer en explosion et dans le cas où cette incendie n’est pas tout de suite éteint, l’usine saute et il ne reste que des cendres du personnel (et il n’est pas certain que les sauveteurs sachent rapidement à combien de personnes ces cendres correspondent).
Bref, tous devaient prendre leur 6 semaines de congés payés pour veiller à leur santé physique et surtout psychique.
Dans l’entreprise électronique d’armement à Sophia-Antipolis, nous avons appliqué cette même règle même si l’établissement n’avait quasiment aucun risque d’exploser, la Murène n’était pas chargée en explosif.
Un polytechnicien, chef du laboratoire de recherche, n’avait pas pris 2 semaines de vacances d’affilée depuis de nombreuses années (plus de 5 en tous cas). Les arriérés de congés non pris dépassaient 150 000 Francs au début des années 1990, soit le salaire annuel d’un technicien.
Les délégués syndicaux ont été surpris que cette question soit mise sur la table. Le directeur était gênée mais c’était de la responsabilité de la DRH et après négociation, nous lui avions fait un virement de 70 000 Francs (notre secrétaire à la signature de ce courrier nous avait fait remarquer que c’était le prix d’une déjà belle voiture) et il devait prendre au moins deux mois de vacances à la fin de son projet (qui n’était certes pas anodin : il s’agissait de mettre au point le compresseur d’impulsions acoustiques du satellite Topex-Poséidon, une première mondiale qui a permis de mesurer la hauteur des océans à 2 cm près vers 1994 et à 2 mm près aujourd’hui ; ce qui a permis de caractériser le phénomène el Nino et les changements climatiques principalement dans l’océan Pacifique).
Et nous avons poursuivi dans l’application de cette règle de bon sens, au grand soulagement de la comptabilité qui ne savait pas quoi faire avec ces arriérés de congés payés.
Pour revenir à la Société Générale, quand l’inspection du travail va-t-elle envoyer à cette banque une amende pour non respect du droit du travail sur les congés payés ?
Au niveau du recrutement
Nous avons recruté à Sophia-Antipolis, un trader au début des années 1990 pour gérer les queues de programmes militaires avec les pays arabes. Ces sommes qui constituaient des avances avant livraison du matériel (avait déjà été livrée par exemple la ceinture électronique de défense de l’Irak face à l’Iran : le chef de projet sans emploi après la première guerre du Golf partageait nos repas dans l’attente d’un nouveau poste) commençaient à rapporter 20% des profits de la filiale du groupe, autant s’en occuper comme il faut !
Le candidat retenu avait 29 ans et avait été dans les salles de changes de Londres, de Singapour et de Hongkong. Il était usé et s’en était rendu compte. Son projet était de trouver une entreprise proche de Nice pour quelques années avant d’ouvrir à Nice un cabinet de conseils financiers.
La négociation de la rémunération fut aussi serrée qu’en Bourse. Commencée à 500 000 francs, nous sommes parvenus à un accord autour de 380 000 début des années 1990 (nous respectons la prescription pénale de 10 ans et nous prenons des exemples de plus de quinze ans). Le contrat de travail fut d’abord renvoyé par la Direction de l’Établissement. Après la garantie apportée par la DRH que ce poste n’entrait pas dans la classification des emplois réalisée avec la méthode Hay et que d’ici 5 ans au plus tard ce poste serait supprimé après le départ de ce jeune trader et la livraison des équipements aux pays arabes… et qu’aucun X Télécom ne devait être jaloux de cette rémunération, la Direction a bien voulu signer ce contrat dont le salaire était dérisoire par rapport aux dizaines de millions de Francs que ce jeune trader allait nous rapporter (nous avions déjà gagné plusieurs millions en laissant dormir ce pactole).
Ce recrutement fut expliqué au Comité d’Entreprise et au personnel. Cet expert en gestion de trésorerie sur les marchés financiers internationaux fut ainsi bien accueilli et vite intégré au milieu des autres experts de niveau mondial.
Ce jeune homme célibataire, sans attache sentimentale, dans un sourire, nous avait avouer qu’il entendait bien rattraper un certain retard dans ce domaine sentimental pour trouver un équilibre de vie ; nous lui avions dit de se méfier tout de même de certaines créatures se promenant sur la Côte d’Azur !
Dans une firme américaine, l’état-major ne confie pas des responsabilités importantes à un jeune cadre sans avoir vu et parler avec sa femme et le cas échéant ses enfants… et la femme n’a pas intérêt à être délaissée ou maltraitée, c’est justement ce qu’ils veulent voir pour savoir si ce jeune cadre bénéficie d’un équilibre familial qui viendra l’aider à récupérer par rapport au rythme intense de la vie des affaires dans lequel il va être plongé.
Ce sont peut-être des méthodes de gestion des ressources humaines basiques et incomplètes mais au moins elles existaient. Elles peuvent servir d’exemple dans un cours de gestion des ressources humaines au lycée ou dans l’enseignement supérieur, c’est un point de départ.
Le cas de la Société Générale est le contre-exemple parfait d’une absence de gestion sérieuse des ressources humaines.
Nous le répétons : l’absence de GRH et le mépris ou l’ignorance des salariés est la marque de fabrique de la bureaucratie et du paternalisme. Le patron n’est plus dans son château mais dans son bureau à la porte fermée, il peut avoir son propre ascenseur pour ne pas croiser malencontreusement son personnel, cela existe très souvent. Une usine ou une entreprise en grève assiégée par les CRS français doit demander l’aide à Angela Merkel pour que la loi française soit écartée et que la loi allemande soit appliquée dans les relations sociales françaises, au moins c’est une réponse intelligente à l’heure actuelle en 2008… et malheureusement encore valable en 2023.
Les critiques des experts américains du Plan Marshall sur le management des dirigeants français.
Elles peuvent nous servir de conclusion tant elles sont toujours d’actualité.
Dans le livre de Thomas Phillipon, le capitalisme d’héritiers, la crise française du travail, page 41, l’auteur reprend le cas après 1945 du plan Marshall lors de la reconstruction du pays (et on ne va pas ressortir ce genre de discours patronaux franco-français comme quoi ce sont les bombardiers américains et les saboteurs et terroristes de la résistance qui ont tout cassé ! par pitié !).
L’auteur cite la note de Luc Botanski
” les experts américains envoyé en France dans le cadre du plan Marshall concentrent leurs critiques sur les chefs d’entreprise et les patrons français. Rappelant que l’attitude constructive dont font preuve les ouvriers aux États-Unis dépend d’abord de l’attitude constructive de la direction, ils reprochent, notamment, aux dirigeants français de s’opposer à tout changement constructif, […] de ne pas laisser une responsabilité et une autorité suffisantes à leurs subordonnés… De manière générale, les Français ne sont pas ” conscients du rapport direct qui existe entre un niveau élevé de productivité et l’application de saines méthodes en matière de rapports humains” .
En 1986 avant de lancer les premiers cercles de qualité dans l’usine, lors du séminaire de Direction, nous avons appliqué la loi des 20/80 : 80% des problèmes venaient de la Direction ou étaient sous sa responsabilité. Comme ces problèmes existaient depuis fort longtemps, la Direction devait accepter de reconnaître cette situation.
Notre Directeur a dit “oui” clairement et fortement . Après cette acceptation humble et lucide qu’il n’arrivait pas seul à régler nos dysfonctionnements, nous avons pu lancer les cercles de qualité pour accompagner la mise au point des automates programmables.
L’année suivante nous avons tous touché 2,3 mois de salaire brut en participation. C’était le simple calcul de la participation ordonnance de 1958. L’année suivante nous n’avons plus touché qu’un demi-mois de participation car les financiers américains du Groupe, avaient rapatrié des provisions aux States et en Suisse, à Montreux-Vevey.
D’où la colère de nos ingénieurs contre les financiers du groupe. En comité de Direction de l’usine, le responsable de la Maintenance et des Travaux neufs qui avait eu en charge l’automatisation des cinq sites de production, s’était écrié « les salauds de financiers américains ». Je m’en suis souvenu en 2006 et 2008 lors de la crise financière et encore aujourd’hui.
Les élèves, les étudiants comme les lecteurs de notre site web apprennent tout cela mais apparemment pas nos politiciens et les bureaucrates de nos organisations.
Dans ce conflit majeur et ce choix de civilisation, il faut savoir qui va gagner !
Automne 2009 : le nombre de suicides au travail augmente toujours en France,
le cas de France Télécoms est encore pire que celui des Banques,
l’élection par les amis politiques du fils du Président à la tête d’un établissement public important de la région parisienne renforce ce sentiment de dégoût : les dirigeants de nos systèmes de pouvoir ne savent plus exercer le pouvoir qu’à travers des réseaux d’influences et de courtisans de plus en plus veules et abjectes dans leur soumission à la manipulation et à l’autocratie des chefs de leurs clans.
Ils utilisent leurs réseaux pour gouverner mais interdisent tout ce qui permet le développement des réseaux citoyens, la démocratie participative et directe, la propriété commune et l’utilisation complémentaire des deux sources de savoirs.
Ce n’est plus de l’anachronisme mais du despotisme pur et dur contre lequel les citoyens ont le droit de se soustraire en vertu de l’article 2 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789… même l’article 16 de la constitution de 1958 ne résiste pas à cet article là.
septembre 2012 : le cas de Peugeot,
extrait d’un article de Marianne : “PSA : après «l’expertise Sartorius», Hollande et Montebourg réagissent ” Mercredi 12 Septembre 2012 à 13:15 Mathias Destal – Marianne
Mais le document met également en lumière d’autres carences chez le constructeur. Plutôt que d’investir sur de nouveaux marchés, comme l’Allemand Volkswagen ou son rival français Renault, les actionnaires de PSA, la famille Peugeot en tête, ont privilégié versements de dividendes et rachats d’actions, pour un total de près de 6 milliards d’euros entre 1999 et 2011, souligne-t-il.
Sartorius reproche aussi au constructeur de ne pas avoir «préalablement mené, sur l’avenir de ses sites industriels, une réflexion d’ensemble qui laisserait aujourd’hui davantage d’options pour faire face à sa situation actuelle de surcapacité».
Quant au choix qui l’a conduit à décider la fermeture en 2014 d’Aulnay, le désaveu est sans équivoque : le groupe a commis l’erreur d’évacuer trop «rapidement la possibilité d’arrêter son usine de Madrid, qui souffre pourtant de nombreux défauts», juge-t-il. «L’histoire aurait probablement pu être écrite de façon différente si la direction de PSA avait entamé en amont un dialogue transparent avec les partenaires sociaux et les pouvoirs publics»
…
Notre question : combien ce méfait du paternalisme va-t-il encore coûter à notre pays ?
Derrière le management, nous ne devons pas oublier les maîtres du monde, l’oligarchie financière anglo-saxonne et sa volonté d’instaurer un gouvernement mondial sous sa domination. Nous allons y venir notamment dans la Partie 5, la transition vers les Réseaux de Vie.